vendredi 1 juillet 2016

Petits manèges

Les manifestations de folie de la part de ce monde sont nombreuses en ce moment. L’impression laissée est celle d’une succession vertigineuse de foucades et de secousses, des plus farcesques aux plus atroces. En a-t-il toujours été ainsi (et cette impression n’est alors due qu’à une surabondance d’informations) ou le diable s’amuse-t-il plus que d’ordinaire ces temps-ci ?
L’Adversaire, si d’aventure c’est la première hypothèse qui est avérée, a certainement sa part dans ce déversement continu d’informations : il ne laisse plus à qui s’y abandonne le temps[i] de réfléchir. C’est l’émotion qui domine alors, le réflexe aussi, et en particulier le réflexe conditionné. Tout cela permet sans doute à divers marchands de n’importe quoi de faire un meilleur chiffre d’affaires que d’austères et silencieux moments de méditation.
Nous assistons en ce moment à d’interminables et répétitifs feuilletons qui nous laisseront pantelants si nous n’y prenons garde. Celui de la loi travail, par exemple, dont chaque épisode semble être une reprise du précédent, parvient encore à faire quelque bruit. Depuis plusieurs mois se succèdent les manifestations, les bravades de M. Valls ou les pleurnicheries de la CFDT, sans compter les forfaits des touristes (professionnels ?) de l’émeute que, si j’étais communiste, je qualifierais d’idiots utiles du grand capital[ii].
Les événements finissent parfois par être leur propre caricature : ainsi, jeudi 23 juin, la nième manifestation contre cette maudite loi travail a suivi un parcours en boucle ; quitte à tourner en rond, autant que ce soit de manière littérale.
Les esprits fins auront observé que cette manifestation tournait autour du bassin de l’Arsenal. Pourquoi ne pas avoir donné un tour ludique et même sportif à toute cette affaire ? On eût pu, par exemple, organiser une de ces joutes navales pratiquées, je crois, du côté de Sète. Sur le pont arrière, surélevé, d’un bateau, on aurait placé M. Martinez, muni d’une perche et d’un bouclier, tandis que MM. Mailly, Mélenchon et quelques autres auraient manié les avirons ; en face, MM. Gattaz, Berger et quelques autres auraient ramé pour M. Valls, ce dernier étant équipé du même attirail que M. Martinez. L’issue du combat eût déterminé une fois pour toutes le sort de la loi tant disputée. Une fois pour toutes, vraiment ? Allons, allons, le perdant aurait ensuite, à n’en point douter, contesté la validité du résultat. C’est peut-être cela, la démocratie, de nos jours…
Curieux et puéril manège, en tout cas, que celui de la loi travail. Ce qui me rappelle les manèges de mon enfance. Le plus élégant, le plus classique aussi, que j’aie fréquenté était celui du Ranelagh, où les petits chevaux avaient leur charme vieillot ; il fallait, au moyen d’un petit bâton, essayer à chaque tour de décrocher un anneau, jeu auquel je me rappelle que j’étais fort malhabile. Au square Saint-Lambert, les chevaux avaient une allure très stylisée, très 1935 : les arts déco et toute la séquelle… Près du métro Convention, il y avait un manège résolument contemporain (nous étions dans les années 1970), avec des voitures, de petites motos… et même des avions !
Ces derniers nous évoquent Notre-Dame des Landes[iii] : encore une affaire où le gouvernement excelle à entretenir la chicane jusqu’à l’hystérie. Et hop ! Encore un tour de manège !
On aimerait cependant un peu plus de calme. Cela permettrait d’austères et silencieux moments de méditation. Et tant pis si ce n’est pas vendeur.


[i] Pas le temps, pas le temps ! Encore un effet de la rapidación ?
[ii] Je ne suis pas communiste, Dieu merci. Mais cette appellation a peut-être du vrai…
[iii] Comme c’est étrange : un « référendum » dont les autorités ne contestent pas le résultat. On en avait perdu l’habitude…

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